Accompagner, épisode 2

Après la classe de seconde du Lycée Lacassagne, arrêt sur image pour le deuxième épisode de cette série d'articles "Accompagner" à LADAPT-Rhône Alpes à Lyon 7e.  LADAPT, association pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées, est une association nationale reconnue d'utilité publique, créée en 1929. Elle pilote plus de 100 établissements et services d'accompagnement, de formation, d'insertion et de soins et intervient auprès de plus de 18000 usagers vivant avec un handicap. Avec une devise : "Vivre ensemble, égaux et différents".

Ces séances d'ateliers d'écriture ont été l'occasion pour moi de découvrir un nouvel univers, où l'écriture n'est pas l'attente d'une performance individuelle mais l'ouverture à un moment de curiosité, de plaisir et de détente partagé. L'attention, le niveau de langue, la capacité à rester assis, l'énergie, l'envie, tout est hétérogène, flottant, suspendu, inattendu..

Ecrire ensemble, égaux et différents.

Accompagner, épisode 2
Crédit photo : Priscilla Du Preez / Unsplash

Un jeudi matin d'avril. OA, PJ, EAM....je parcours la liste d'appel, où derrière des noms et des prénoms, s'invitent des acronymes que je ne connais pas. Je les découvrirai au fil des séances, chacun recouvrant une réalité, une pathologie, un handicap, visible ou invisible.

 

Je remplace Martine, en convalescence d'une hospitalisation, puis sur ses absences ponctuelles. Je serai là 8 séances d'avril à octobre.

 

Dans la vaste salle, les tables en carré nous rassemblent pour une bulle d'écriture.

 

A travers la baie vitrée qui ouvre sur un espace arboré entre les immeubles, je ne vois personne aux balcons environnants.

Mais l'unique et jolie plante verte, qu'une salariée de l'association vient arroser à midi, nous observe avec curiosité.

 

Les tables roulantes, les chaises adaptées, le cartel en braille sur la porte, la climatisation douce, les volets automatisés, Les ascenseurs spacieux, les WC immenses, tout nous accueille avec sérénité dans un espace sécure et clos.

 

Alors que dehors, les toiles de tentes des migrants se succèdent sous le pont de la gare de Jean Macé, tout semble nous dire que pour quelques heures nous sommes à l'abri. Et je mesure la chance que nous avons tous d'être là.

intervenant ecriture
Les tables en carré nous rassemblent pour une bulle d'éciture - Crédit photo : Sylvie Gier

J'interviens de manière ponctuelle et je m'attache donc à installer mes "apparitions" comme des ponctuations, des petites fenêtres qui ouvrent sur des mondes différents.

Nous travaillons sur le thème de l'arche, du voyage lointain, nous inventons ou revisitons des lieux où déambulent des personnages qui portent les prénoms des membres de l'atelier.

Nous réflechissons au sentiment de liberté.

A partir de cadavres exquis, nous nous posons des questions qui débouchent sur des monologues tourmentés, des dialogues, tendres ou un peu fous.

Nous inventons des modes d'emploi pour rater des choses.

Nous nous aventurons vers le haïku.

Et nous rêvons, beaucoup : si j'étais un paysage, si j'étais un son, une odeur, une matière...

A bord de cette arche tranquille, je récupère au passage feuilles volantes, morceaux de textes que les participants ont envie de me laisser. 

 

Tu les trouveras ici,  organisés dans ce livret comme autant de bouteilles à la mer lancées vers toi dans un sourire !

Accompagner, épisode 2
Crédit photo : Sylvie Gier

J'ai été particulièrement sensible à la musique et aux échos du texte collectif rassemblé à partir des "Si j'étais..."

 

"Si j'étais un paysage, je serais un cours d'eau m'emmenant vers l'inconnu.

Si j'étais une odeur, je serais un bouquet de roses variées et parfumées.

Si j'étais un son, je serais une foule scandant mon nom pour que je me surpasse dans l'effort.

Si j'étais une matière, je serais une viande rouge à griller et à partager avec des amis.

Si j'étais une odeur, je serais une tablette de chocolat suisse.

Si j'étais un son, je serais un murmure, une boule de coton étouffée et perdue.

Si j'étais un paysage, je serais une personne qui nage avec les animaux marins.

Si j'étais une matière, je serais un caillou lisse.

Si j'étais une odeur, je serais loin de la fumée.

Si j'étais un son, je serais un orgue accompagnant une chorale d'église, avec les voix qui vibe à travers mes notes.

Si j'étais un paysage, je serais la plante merveilleuse que j'ai plantée.

Si j'étais un son, je serais le crépitement d'un feu de camp dans le silence de la forêt.

Si j'étais une matière, je serais une peau lisse sortant du hammam.

Si j'étais une odeur, je serais une bougie parfumée aux notes d'agrumes et de cannelle, me projetant instantanément dans les fêtes de Noël passées.

Si j'étais un paysage, je serais un lac paisible.

Si j'étais un son, je serais une foule en joie.

Si j'étais un paysage, je serais en haut du Grand Canyon à contempler le paysage et profiter de l'instant.

Si j'étais une odeur, je serais l'herbe tondue, dont le parfum enivrant et propre me donne envie de me rouler longuement à l'intérieur.

Si j'étais une matière, je serais le squelette d'une baleine échouée.

Si j'étais un son, je serais un hurlement qui trouble le silence de la nuit, créant une ambiance mystérieuse et terrifiante, digne d'un film d'horreur.

Si j'étais une odeur, je serais l'écorce d'un arbre après l'orage.

Si j'étais un son, je serais une musique romantique chantée à la personne que j'aime.

Si j'étais un paysage, je serais un cheval qui court dans l'eau avec une colombe qui vole.

 

Si j'étais un son, je serais un crépitement léger qui vient chuchoter dans les oreilles des amis assis autour du feu, un bruit chaleureux qui vient réconforter ceux qui ont froid, un petit « clac » qui rappelle aux gens qu'ils sont bien."

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Un extrait du manuscrit de Sylvain - crédit photo : Sylvie Gier

On me parle du toit-terrasse, évoqué dans un des textes, au dernier étage, celui du réfectoire. Comme un point névralgique du bâtiment. Je retiens aussi de ces heures partagées l'accueil chaleureux, la camaraderie et le soutien entre les gens, 

 

A midi, l'arche doit repartir. Retour vers la gare TER de Jean Macé, et la terrasse-jardin-bar au mobilier de récup, qui la jouxte, toujours déserte mais dédiée sans doute à des afterworks que je ne connaîtrais pas. Bientôt l'escalator, puis le métro jean Macé m'emportent vers la Part-Dieu, puis Villeurbanne.

 

Mon challenge pour la prochaine saison, découvrir le toit-terrasse ;)

 

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